Le collège du Chesne est un véritable témoin de la situation vécue par les territoires ruraux, de l'entêtement des administrations, dans le cas présent, de celle de l'Education Nationale, un entêtement évidemment avec l'assentiment des plus hauts responsables, du gouvernement, pour supprimer les services publics dans les territoires ruraux.
Entêtement, harcèlement de l'administration au mépris des décisions de justice, au mépris de la démocratie !
Je ne peux m'empêcher certains souvenirs, octobre ou novembre 1995 (bientôt 20 ans !). J'étais alors présidente de la FCPE des Ardennes : nous avions été convoqués par le Recteur qui voulait nous informer de sa décision de diminuer le nombre des collèges dans les Ardennes, avec déjà de la langue de bois : c'était pour le bien des enfants ! J'avais alors répondu que la discussion était évidemment ouverte, mais qu'il fallait qu'il nous démontre que les élèves des "petits collèges" avaient effectivement de moins bons résultats et que cela ne pouvait se faire que si cela ne s'accompagnait pas de diminution de postes d'enseignants dans le département, la situation sociale de notre département (déjà à l'époque) et les résultats scolaires globaux du département (on a eu des éléments collèges par collèges quelques années plus tard ; curieusement, ce n'était pas dans les plus petits collèges que les résultats étaient mauvais) au dessous de la moyenne nationale, tout cela nécessitait la solidarité nationale et que le fameux rapport du nombre d'heures d'enseignants par élèves (H/E) reste au dessus de la moyenne nationale.
Je vous passe la suite, les mobilisations multiples des parents, des élus, chaque lutte étant suivie d'une période de calme, l'administration ayant compris que ce n'était pas le moment, mais restait en embuscade ! Bravo à la ténacité des parents et des élus locaux !
Et j'en viens aux derniers évènements au collège de Le Chesne : en juillet, le tribunal administratif donnait raison à ceux qui avaient contesté la fermeture annoncée de ce site collègien. Mise en défaut, l'Education Nationale a réouvert le site mais à minima et malgré l'avis négatif de deux conseils d'administration du collège en juillet, décidé qu'il n'y aurait plus de classe de 3ème à Le Chesne.
Comme j'ai un peu de suite dans les idées, que rien n'a changé depuis 95, qu'aucune démonstration n'a été faite de l'intérêt de regrouper les collèges pour le bien des enfants et que plus que jamais les décisions de fermeture relèvent avant tout de la volonté d'économies, j'étais évidemment présente ce matin à Le Chesne : blocage symbolique des bus emmenant les élèves de troisième vers Vouziers, rassemblement devant le collège de parents, d'élus (des maires, des conseillers municipaux, je n'étais pas la seule élue régionale - par contre on peut s'interroger sur l'absence de conseillers généraux), de membres du collectif08"Sauvegardons nos école".
Même si presque vingt ans de mobilisation, cela a usé la population, l'histoire montre bien l'intérêt de se mobiliser, car les victoires, même si elles sont toujours restées provisoires, ont toujours été au bout des mobilisations au Chesne ! C'est un encouragement à continuer !
Je ne peux m'empêcher de faire le lien avec le colloque organisé hier à la foire de Chalons par le CESER dont le thème initialement prévu s'était un peu transformé du fait de l'actualité pour parler de la réforme territoriale. Je ne vous en ferais pas le récit : ce serait trop long, sauf pour vous dire la critique assez globale de cette réforme (évidemment pas par la ministre !) avec l'idée qu'avant de parler recomposition des régions il faut savoir pourquoi on réforme !
Et je conclurais par mon immense inquiétude : celle que la réforme telle qu'elle est prévue, au lieu d'irriguer les territoires, les draine, les assèche pour tout concentrer dans les métropoles (reconnues en tant que telles ou villes centre de fait) : une catastrophe pour les territoires ruraux, mais plus globalement une catastrophe pour la qualité de vie de l'ensemble des Français qui ont la chance d'avoir un pays où la nature est encore largement présente ! Sans parler du non sens économique.