Le conseil régional a publié sa feuille de
route santé en décembre (
à
lire ici) : 129 pages sur la santé, prise en sens large du
terme, le bien être de la population. Sauf que l'on peut se
demander si le but n'est pas de noyer les compétences de la
région, en terme de formation du personnel paramédical, pour mieux
masquer l'indigence !
Passons sur le verbiage, dont voici un bel exemple : "
L’innovation
permettra aussi de développer le concept original d’hôpital 4.0
afin de permettre que les solutions innovantes soient mises au
service du monde hospitalier dans l’objectif d’améliorer ou de
faciliter un certain nombre de process." L'analyse du vocabulaire
de ce texte mériterait de s'y attarder : 72 fois le mot
"
entreprise", deux fois seulement l'expression de "
service public"
et uniquement pour parler du service public de l'orientation.
La santé au sens global du terme, alors tout
y passe ou presque : l'eau, l'air, le réchauffement
climatique et la politique de transport ... mais même là, ce qui
pourrait fâcher le monde de l'entreprise n'est pas mentionné. En
ce qui concerne l'eau par exemple aucune mention n'est faite à la
préservation et à l'usage partagé de la nappe phréatique du Sud
Ouest Vosgien qui a pourtant fait l'objet d'une autosaisine de
CESER (
à
lire ici)
Tout y passe ou presque mais pas le social,
pas les inégalités de santé, pas les étudiants qui
doivent aller aux restos du Coeur ou au Secours Populaire pour
manger ! Pourtant, si le social n'est pas une compétence
particulière des régions, certaines actions volontaires seraient
possibles, tout autant que d'autres annoncées dans cette feuille
de route. Encore faudrait il sortir de la langue de bois pour être
dans le concret comme instaurer une tarification sociale de la
restauration dans les lycées, comme il en existait une dans
l'ancienne Champagne Ardenne, rapidement oubliée par la droite.
Pour rester dans la comparaison avec l'ancienne Champagne Ardenne,
on peut s'étonner de la proposition comme d'une nouveauté
d'accompagner les jeunes des missions locales dans leur parcours
santé !
Le Conseil Régional revendique une nouvelle gouvernance de
l'organisation territoriale de la santé et de sortir de l'approche
centrée sur la dimension budgétaire et comptable.
Pourtant, ce
même Conseil Régional avait approuvé le plan régional de santé
présenté par l'ARS. Nous ne sommes pas à une contradiction près !
Autant la critique des ARS est nécessaire, autant il serait
indispensable de les remplacer par des structures de gouvernance
démocratique, autant on ne peut que s'inquiéter d'un Conseil
Régional voulant s'occuper de la santé, comme s'il était tout seul
en France ! On peut par exemple s'interroger sur les concertations
faites avant l'élaboration de cette feuille de route, dont les
représentants dans les instances de concertation de l'ARS n'ont
même pas été mis au courant. Réinventer la poudre n'a jamais fait
avancer.
Se vanter de ses actions semble une constante de ce Conseil
Régional, mais il ferait mieux de se taire. On apprend par exemple
qu'il a fait le choix de se doter d'un plateau médical interne
avec 2 médecins, pas un par ancienne région, et 8 infirmières, pas
une par département ! Vive la proximité pour ses personnels ! Mais
le personnel régional n'est sans doute pas une préoccupation pour
ce conseil régional puisque les orientations budgétaires pour 2021
prévoient une baisse de 11% des dépenses d'administration, ce qui
ne peut qu'avoir des conséquences sur le personnel régional ... et
sa santé !
La deuxième partie de cette feuille de route
veut proposer des "solutions sur mesure pour un égal accès aux
soins sur l'ensemble du Grand Est". Enfin se dit-on, nous
voici au cœur du problème. Hélas, nous repartons vers le grand bla
bla bla avec des propositions comme le soutien aux aménagements
paysagers ! Le Conseil Régional cherche à se mettre en valeur pour
le plaisir d'exister avec la volonté de s'impliquer dans les
contrats locaux de santé proposés par l'ARS. Noyée dans ce
charabia, une proposition est concrète : celle d'aider à la
construction d'
hôtels hospitaliers.
C'est en fait une proposition très dangereuse pour accompagner
l'ARS et les directions hospitalières dans le développement de
l'hospitalisation ambulatoire dans les cas où elle n'est pas
socialement acceptable !
Tout aussi dangereuse la proposition de
soutenir des projets visant à maintenir une permanence des soins
dans les zones rurales ou périurbaines avec des organisations
innovantes comme l'intervention en première ligne de paramédicaux
!
Mais la grande solution proposée par le conseil régional, c'est la
télémédecine ! Et à toutes les
sauces. De quoi faire haïr la télémédecine, comme vecteur
d'inégalités. Alors qu'elle peut être utile dans certaines
situations, la promotion qui en est faite, la présenter comme
solution là où elle est la plus dangereuse, les zones rurales, les
personnes âgées car elle risque de devenir le seul recours, ne
peut qu'inquiéter sur l'avenir !
Au cœur des compétences de la région,
la
formation des personnels paramédicaux :
plus que des discours, il faudrait des chiffres
! L'avis du CESER sur les orientations budgétaires 2021 (
à
lire ici) demande " à ce que l’augmentation du nombre de
places dans les formations sanitaires et sociales, vu l’urgence,
correspondent réellement aux besoins". Il semble donc que ce n'est
pas le cas ! D'ailleurs, curieusement, l'ARS a financé en 2020 des
places de formations en école d'aide soignant ou d'infirmier.
C'est elle aussi qui finance les formations d'infirmiers en
pratique avancée. C'est un curieux transfert financier, en fait de
la Sécurité Sociale (puisque c'est de là que vient la majeure
partie des recettes des ARS) vers ce qui devrait être financé par
la région, alors que nos hôpitaux auraient tant besoin de cet
argent !
La formation en apprentissage est mise en avant alors que ce n'est
sans doute pas là où elle est le plus utile - la formation
traditionnelle repose déjà sur un fort compagnonnage - mais risque
plutôt de faire des formations à deux vitesses : les groupes
privés impliqués dans les EHPAD se sont déjà proposés pour
accueillir des apprentis, en gros pour avoir une main d'oeuvre à
bas prix.
Plus utiles seraient certainement des contrats assurant un salaire
pendant la formation en échange d'un engagement à travailler dans
le service public hospitalier de la région quelques années, tout
particulièrement dans cette région où on se plaint du départ des
professionnels vers des pays voisins où les salaires sont plus
élevés : mais de cela, il n'est pas question !
Pas un mot non plus sur le nombre de
médecins formés en région. Certes, ce n'est pas de la
compétence du Conseil Régional, mais il a l'air si tenté de
s'exprimer hors de ses compétences : pourtant on forme moins de
900 médecins par an dans la région alors que les départs en
retraite sont supérieurs à 1000 par an !
La dernière partie de cette feuille de route
est consacrée aux "moteurs de l'attractivité de la santé dans le
Grand Est", un grand fourre tout qui va du thermalisme à
la culture. Toute une partie est consacrée à l'innovation et à la
recherche : un grand débat démocratique serait nécessaire pour
faire la part de ce qui est utile à la population et de ce qui ne
servira qu'aux appétits financiers. De même l'hôpital 4.0 annoncé
mériterait débat. Il rappelle le lycée 4.0, autre trouvaille de ce
conseil régional dont le CESER demande avec insistance une
évaluation : pour ma part, je ne sais toujours pas si tous les
lycéens ont enfin accès à leurs manuels en ligne. La seule chose
que j'ai compris, c'est qu'on les habitue à ne pas pouvoir se
passer des logiciels de Microsoft.
En conclusion, disons que cette feuille de route santé du Grand
Est semble essentiellement un outil de communication, la
difficulté de sa lecture pouvant faire croire à un vrai projet
très complet, mais il ne s'agit que de compilation tout en mettant
en évidence les failles de la politique régionale : une politique
ignorante des conditions socio-économiques d'une large partie de
la population et s'engageant sans sourciller vers une politique de
santé à deux vitesses actant le manque de médecins dans les zones
rurales et les EHPAD.
Ecrit pour l'Humanité des Débats du vendredi 13 novembre :
1. La pandémie de Covid 19 semble démontrer une
forte dépendance de notre système de santé. Dans quelle mesure et
dans quels domaines précisément ?
Le taux d’occupation des lits de réanimation est l’indicateur
principal du gouvernement pour décider de mesures
restrictives ! A tel point qu’on en oublierait l’importance
de prévenir la maladie. Notre pays a subi des suppressions
massives de lits, résultat des politiques des gouvernements
successifs : il y a trois fois moins de lits de réanimation
par habitants qu’en Allemagne et ce manque était déjà flagrant
avant l’épidémie. Les politiques de restructurations, s’attaquant
en priorité aux hôpitaux de proximité, avaient transformés des
services de réanimation en services de soins continus ou les
avaient tout simplement fermés, dans un but économique, aidées par
le manque de professionnels, conséquence du numerus clausus.
C’est en fait l’ensemble du système de soins, à la fois en
hospitalisation et ambulatoire, qui s’est révélé incapable de
faire face à cette épidémie, du fait du manque de professionnels,
de leur inégale répartition sur tout le territoire et de la
désorganisation en lien avec l’injonction constante à la
diminution des dépenses.
Notre système de santé est dépendant des prescriptions européennes
de réduction des dépenses publiques ! Son approvisionnement
en matériel (masques, respirateurs …) ou médicament a été
compromis par les délocalisations.
2.Les politiques de libéralisation du secteur de la santé
peuvent-elles être incriminées dans cette situation ?
La tarification à l’activité a été utilisée à la fois pour
restreindre les dépenses publiques de santé et pour la mise en
concurrence public/privé, facilitant l’organisation des cliniques
privées autour des activités programmées rentables. Avec des
honoraires médicaux hors tarification et des conditions de travail
meilleures du fait de l’absence de prise en charge des urgences,
le privé est devenu attirant pour les médecins. D’autant que les
directions d’hôpitaux ont pris comme modèle la gestion privée,
mettant en porte à faux les soignants avec leur éthique. Les
départs successifs ont aggravés les conditions de travail, source
d’un cercle vicieux de départ, qui touche maintenant tous les
soignants.
3. Comment en sortir et à quelles conditions ?
Des mesures d’extrême urgence sont nécessaires à l’hôpital :
embauches massives et pérennes de brancardiers, agents de
nettoyage … etc, pour que les soignants se concentrent sur leur
cœur de métier : le soin ! Cela doit s’accompagner d’un
changement de politique à l’intention des soignants -
revalorisation salariale et respect de leurs motivations :
soigner les malades et non le budget de l’hôpital – et d’un grand
plan pour ouvrir massivement des formations de soignants.
Cela est incompatible avec le projet de loi de financement 2021 de
la Sécurité Sociale, qui, en son état actuel, doit être rejeté.
La crise hospitalière a fait oublier que le mieux est de ne pas
être malade ! Il faut sortir de la politique actuelle,
aberrante et inefficace, de tests pour permettre un vrai isolement
des seuls contaminés. Les tests antigéniques, même imparfaits,
permettent cet isolement immédiat ! L’État doit, en lien avec la
Sécurité sociale, en assurer la distribution à tous les
professionnels de santé de proximité pour que chaque personne
ayant un doute puisse être testée.
Le premier confinement a montré la capacité des professionnels à
s’auto organiser, tant à l’hôpital qu’en ville, en dépit souvent
des directions d’hôpitaux et des ARS. Il faut continuer à
s’appuyer sur l’efficacité de la démocratie pour décider des modes
d’actions, en associant les représentants de la population, élus
ou association d’usagers. Cela pourrait préfigurer une vraie
démocratie en santé.
Enfin, il faut reconsidérer notre politique du médicament, aller
vers un pôle public. La Coordination Nationale des Comités de
défense des hôpitaux et maternités de proximité soutient
l’initiative citoyenne européenne right2cure pour rendre le futur
vaccin ou traitement contre le Covid-19 accessible à tous. Cette
initiative peut contribuer au débat pour libérer le médicament de
la recherche de profits.
La cour des comptes vient de sortir un rapport
sur les groupements hospitaliers de territoire (GHT). On peut le
trouver en cliquant
ici.
Le cour des comptes est dans son rôle, même si on peut le
discuter, en disant que la création des GHT n'a pas été faite avec
une recherche d'efficience ! De fait, cela n'était pas écrit noir
sur blanc dans les lois successives pour mieux faire passer la
pilule et masquer la volonté de nouvelles économies à l'hôpital.
Et concrètement, la cour des comptes a sans doute raison : les
réformes ont contribué à la désorganisation, le temps passé à
essayer de faire des économies ne l'a pas été à soigner et le
rapport qualité des soins/dépenses a sans doute baissé !
Par contre, une fois de plus la cour des comptes sort de son rôle
dans ses préconisations en regrettant que les établissements à but
lucratif ne soient pas intégrés dans les GHT et en stigmatisant la
faible taille de certains GHT !
La Cour des Comptes met sur un pied
d'égalité secteur public et privé, en demandant une
meilleure intégration des différentes activités, quelque soit leur
nature juridique. Mais elle oublie que le principe même d'un
établissement à but lucratif, c'est de se faire du fric sur le dos
des malades et de la Sécurité Sociale. L'exemple donné à la page p
51 du rapport, concernant l'imagerie dans le Var est effectivement
scandaleux : le secteur public n'a pas les 20 radiologues qui lui
permettraient d'avoir une permanence des soins de bonne qualité
dans le département, alors qu'il y a 70 radiologues libéraux dans
la seule ville de Toulon qui ne travaillent qu'aux heures
ouvrables ! Mais le but est il de faire profiter les radiologues
libéraux de la manne publique par un montage comme il y en a
ailleurs, avec l'utilisation des équipements publics par le privé
? Ne faudrait il pas plutôt déconventionner ces radiologues s'ils
ne participent pas à la permanence des soins ? Les inégalités de
salaires entre médecins du public et du privé à l'avantage du
privé, qui en plus n'a pas les mêmes contraintes, sont
insupportables.
Méfions nous ! Les préconisations de la Cour des Comptes sont
souvent retenues : elle insiste lourdement sur la nécessite
d'intégrer les établissements privés dans le fonctionnement de la
psychiatrie publique.
Elle critique les GHT de petite taille, les
accusant de tous les maux et préconise une meilleure intégration
des différents hôpitaux au sein de leur GHT :
- ils seraient antagoniques d'un bon recrutement médical ... mais
on en aimerait des preuves, car les regroupements ont aussi
provoqué des départs de l'hôpital public !
- ils n'auraient pas la taille critique pour constituer une offre
de soins homogène, avec chiffres à l'appui : 38 GHT sans
angioplastie coronaire, 24 sans unités neurovasculaire. Mais le
but n'est pas d'avoir des chiffres, mais une offre réelle de
proximité pour les patients. Pour illustrer, le GHT du Nord
Ardenne fait partie de ces GHT sans angioplastie coronaire. S'il
était fusionné avec le GHT de Reims, cela ferait un GHT de moins
sans angioplastie .... mais concrètement, les Ardennais devraient
toujours être transférés à Reims pour bénéficier de ces soins,
très urgents dans certains cas. Le scandale de l'absence de
création d'un tel service dans les Ardennes (promis pourtant dans
le plan de performance) ne serait pas résolu, mais la Cour des
Comptes verrait une amélioration de ses chiffres ! Ce n'est donc pas la taille du GHT qui compte : il faut ouvrir de nouveaux services d'angioplastie coronaire ou d'unités neurovasculaires !
- ils ne faciliteraient pas le développement de la recherche !
Tout cela est la négation de ce qu'il faudrait, des coopérations
volontaires, plutôt que cette usine à gaz antidémocratique :
d'ailleurs p 57 du rapport, on lit avec consternation que 74 à 124
ETP de médecins ou de directeurs ont été consacrés pendant un an
exclusivement à l'écriture des projets médicaux des GHT.
Pour continuer sur l'exemple ardennais, la Cour des Comptes cite
le GHT du Nord Ardenne en exemple p 64 et encore 68 pour son
caractère intégratif. Les Ardennais dans leur ensemble n'ont pas
vu la moindre amélioration, ceux du secteur de Sedan, la
dégradation !
Quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage ! Pour mieux
stigmatiser le secteur public, la Cour des Comptes donne en
exemple le secteur privé (les groupes Ramsay, Elsan) pour leur
gestion centralisée, mais on attend les preuves de l'efficacité de
la gestion du privé sur les soins !
L’épidémie progresse, et le gouvernement
s’entête dans les mesures liberticides : après les plages,
forêts et parcs pour les premières chaleurs de mai, ce sont
maintenant les bars dont l’accès est limité dans certains
territoires pour les premiers frimas de l’automne ! C’est une
politique très contre-productive, car son arbitraire n’aide pas à
la compréhension par l’ensemble de la population de l’intérêt des
gestes barrières.
Cela permet de masquer l'incurie gouvernementale, qui continue de
fermer des lits d'hôpitaux. Les chiffres de 2019 sont parus : plus
de 3400 lits supprimés en hospitalisation complète pour 1500
places d'hospitalisation ambulatoire créées. Malgré le COVID et le
Ségur, en 2020 on continue : à Juvisy, on ferme le service
de médecine interne, à Besançon, le service de SSR ...
L'urgence serait de donner aux hôpitaux publics les moyens de
répondre aux besoins de la population et de lancer la création
d'un véritable service public de soins de premier recours autour
des centres de santé.
J'ai eu envie de partager avec vous deux lectures studieuses. Le rapport
demandé à l'IGAS et à l'IGF concernant l'évaluation de la dette
des établissements publics de santé et des modalités de sa reprise
vient d'être publié. Parallèlement, la presse se fait l'écho des
propositions de l'IFRAP pour le système de santé, ce qui m'a amené
à chercher ce qu'était l'IFRAP.
Le rapport sur les modalités de reprise de
la dette des hôpitaux (à lire
ici)
confirme la volonté du gouvernement d'en
faire un outil de restructuration des hôpitaux, pour ne pas dire
un outil de chantage.
Rappelons : le gouvernement a annoncé en novembre dernier
reprendre un tiers de la dette des hôpitaux. Cette dette s'élève
globalement à plus de 30 milliards d'euro et 42% des hôpitaux sont
considérés comme surendettés, avec quelques établissements encore
très menacés par les emprunts toxiques, notamment Nantes,
Saint-Etienne, Arras et Dijon. On apprend dans le rapport
également que certains hôpitaux, comme Valenciennes, se voient
refacturer une dette portée par un GCS (Groupement de coopération
sanitaire).
L'endettement empêche les hôpitaux d'investir, même pour
l'équipement courant, avec un taux de vétusté que le rapport
estime à 80 % en moyenne !
Le mécanisme financier proposé par le rapport a déjà été mis en
oeuvre par le gouvernement : c'est la CADES (Caisse
d'Amortissement de la dette sociale) qui reprend la dette avec
celle de la sécu due à l'épidémie. Le gouvernement a ainsi décidé
de s'en débarrasser sur les assurés sociaux, alors que l'état
bénéficie de taux d'emprunts moins élevés que la Sécurité Sociale.
La seule raison compréhensible est la volonté de pouvoir continuer
à parler du trou de la Sécu pour prôner des mesures de réduction
des dépenses. Et de même les hôpitaux vont se voir allouer chaque
année une aide pour rembourser leurs annuités d'emprunts et les
charges financières afférentes, mais la dette sera toujours
inscrite dans leurs comptes.
Les banques, elles, ne verront pas de changement et encaisseront
les intérêts !
On passera sur les longues explications sur la compatibilité de
cette reprise de dette avec les obligations européennes, sauf pour
remarquer combien nous sommes loin d'une politique européenne de
développement des services publics !
Le rapport pointe tout ce qui pourrait permettre de minimiser
l'aide apportée aux hôpitaux : par exemple, un hôpital qui s'est
endetté pour construire un EHPAD ne sera pas aidé, car il ne
s'agit pas de lits d'hospitalisation, mais d'hébergement. De
l'aide seront aussi déduits d'autres engagements de soutien !
D'après le rapport, ce retraitement de la dette devrait davantage
pénaliser les plus petits hôpitaux : une manière de s'en prendre à
la proximité !
Au total, selon les scenarios envisagés, le premier versement aux
établissements devrait être de l'ordre de 350 millions (à peine
plus du centième de la dette !) et seulement aux hôpitaux qui
s'engagent dans une contractualisation avec les ARS.
Car il s'agit d'un véritable chantage : le rapport détaille
les contrats qui devront être conclus entre les ARS et les
hôpitaux pour la reprise de leur dette avec des objectifs
financiers et de mise en oeuvre de la loi masanté 2022 :
recomposition de l'offre, mutualisation ...
Il va falloir hurler (tant le gouvernement est sourd) que ces
contrats ne peuvent être conclus dans le secret des bureaux de
l'ARS, mais par un processus démocratique : c'est notre argent !
Pour une autre vision l'investissement hospitalier, allez donc
lire cet
article pour
voir comment répondre aux besoins humains avant ceux du capital.
L'une des propositions de l'IFRAP (fondation
pour la recherche sur les administrations et les politiques
publiques) pour le système de santé donne le ton : la fin
du statut de la fonction publique hospitalière en procédant comme
chez France Télécom. Il faut oser l'écrire : c'est à la dernière
page du document que vous pouvez trouver
ici.
L'IFRAP est une fondation proche de la droite libérale. Quelques
articles éclairent sur son fonctionnement : celui d'
ACRIMED
ou de
Marianne
dont le titre est un bon résumé : "
Faux institut de recherche
et vrai lobby ultralibéral"
Le ton fait sérieux. Les longues références à l'Allemagne donnée
pour modèle m'ont incité à aller voir le classement de l'Allemagne
dans l'EHCI, ce classement des pays européens pour leur politique
de santé, cité par l'IFRAP. L'Allemagne est après la France :
drôle de modèle ! La lecture des documents de l'EHCI, un institut
suédois (à retrouver
ici),
montre par exemple que l'Allemagne est dans le rouge pour son taux
de césariennes trop important, alors que la France est dans le
vert. Il s'agit là sans doute d'un bon indicateur de la volonté de
profit sur la naissance !
En fait ce texte ne mériterait aucune attention, sauf que, comme
le rapport de la Caisse des dépôts et Consignation du printemps,
il propose de transformer les hôpitaux publics en ESPIC ! C'est
vraiment dans l'air du temps. Méfions nous de cette manière
détournée de vouloir privatiser les hôpitaux publics.