Il faut rappeler cette histoire pour ne pas se tromper dans les responsabilités : celle de la droite est énorme. Et cette aggravation des conditions de scolarité s'est accompagnée d'une réduction massive du nombre des enseignants.
Le challenge du changement était donc difficile pour le PS : le simple retour à la situation antérieure du samedi matin était impossible. Comment demander à des enseignants extenués par l'apnée prolongée de travailler plus alors qu'ils ont vécu la suppression du samedi matin comme l'accession enfin à la réduction du temps de travail que d'autres ont obtenu à l'époque de Jospin ? Rappelons deux choses : tout d'abord que le travail des enseignants va bien au delà de leur temps de présence en classe, qu'il leur faut préparer, corriger mais aussi que leurs salaires ont entraîné les mêmes baisses de pouvoir d'achat que ceux qui ont accédé à des réductions de temps de travail. Et pour en finir avec la question vu du côté enseignants, réaugmenter le temps d'école ne peut donc passer que par l'augmentation du nombre d'enseignants, mettre plus d'enseignants que de classes à une échelle sans comparaison avec ce qui a été fait à cette rentrée.
Car, pour les enfants il faut réaugmenter le temps scolaire et pas seulement pour les garder à l'école en attendant les parents, ni même pour les faire profiter d'activités sportives ou culturelles sans lien avec l'école. Réaugmenter le temps scolaire mais en les défatiguant, en leur donnant le temps de respirer.
Car on les met en bas du lit ( au moins pour ceux qui restaient chez eux, mais avec le chômage des pères et mères, il y en avait beaucoup ) un jour de plus par semaine, les journées d'écoles proprement dites sont plus courtes mais toujours aussi intenses, en apnée et suivies sans le temps d'un souffle par une activité culturelle ou sportive où les intervenants, pleins de bonnes intentions, tiennent à ce que les enfants ne perdent pas une minute. Et il faut aller vite, pas le temps de respirer, d'autant plus que dans la majeure partie des cas, cela ne dure que trois quarts d'heure. Dans le département, les tentatives pour se sortir de ce piège se sont soldées d'ailleurs par un refus du directeur académique de l'Education Nationale.
Alors, oui, la question de la fatigue des enfants n'a pas été solutionnée mais amplifiée. Et d'ailleurs les chronobiologistes ont été invoqués mais leurs avis non suivis quand ils proposent de reporter en seconde partie d'après midi les apprentissages fondamentaux.
Le PS a voulu aller vite, trop vite pour corriger la casse de Sarkozy mais est resté dans l'effet d'annonces, et s'est enfermé dans ses absurdes contraintes d'austérité rejetant sur les communes les indispensables dépenses supplémentaires, déconstruisant le cadre national de l'école, aggravant les inégalités territoriales, sociales. J'ai été scandalisée d'apprendre par exemple que la ville de Bogny sur Meuse, dont le maire a voulu être le bon soldat du PS en appliquant la réforme dès cette rentrée, faisait payer les familles !
Mais reconnaissons que le challenge était difficile pour les communes, car en dehors même des difficultés financières (majeure en cette période où le gouvernement veut baisser les dotations aux collectivités), comment organiser des activités pour les enfants autrement qu'avec des salariés à temps partiel ? Ou en heures sup. - contradictoire dans cette période de chômage massif !
Car soyons sérieux : une bonne réforme demandait un peu de temps, du temps de concertation, du temps pour former de nouveaux enseignants pour allonger la présence des enfants à l'école, pas pour en faire plus mais pour le faire mieux avec des temps de respiration, avec des temps où l'informel vient compléter les enseignements formels, où le temps permet d'avancer vers une prise en compte des enfants comme s'ils n'avaient rien appris chez eux. Cela supposerait que l'ensemble du temps passé à l'école soit pris en charge par les enseignants et donc plus d'enseignants. Cela permettrait des organisations plus souples, plus respectueuses des enfants, moins fatigantes, contribuant à rejeter l'échec scolaire.