Réserver la sécurité sociale aux cas graves
pour mieux enrichir les complémentaires du monde de la finance !
Cette idée, atrocement réactionnaire, qui casse les solidarités, a
eu le mérite de mettre la protection sociale au premier plan des
débats politiques du moment.
Au fait, comment Monsieur Fillon, vous pouvez trancher entre un
cas grave et un pas grave : la grippe actuelle est un bon exemple.
Ah, c'est vrai, vous avez rétropédalé ... sauf que vous avez
montré votre vrai visage et que mes amis catholiques hurlent
devant l'image d'une religion pour les riches que vous donnez de
la leur, qui veut être la défense des pauvres.
Cela a permis aux Français de démontrer leur attachement à la
sécurité sociale, car même si le texte proposé par André
Grimaldi était pauvre dans son contenu - un peu du tout sauf
Fillon - l'engouement provoqué par cette pétition est un symbole
fort.
Et depuis chacun y va de sa conception de la sécu.
C'est avec plaisir que les communistes
voient que leur proposition de 100% sécu est reprise :
100% sécu, cela veut dire, le remboursement des soins prescrits à
100% par la sécu. Plus besoin de mutuelles, qui peuvent utiliser
le remarquable réseau de militants qu'elles ont pour autre chose,
l'éducation à la santé, l'expression démocratique des besoins de
santé, le suivi des réalisations ..., des choses bien plus
intéressantes pour l'humain que de la gestion financière et commerciale dans le
cadre défini par l'Europe de mise en concurrence avec les
complémentaires privées et les banques.
Cela serait une économie, car c'est à la fois économiser la double
gestion sécu/mutuelle (et celle des mutuelles est beaucoup plus
chère) et économiser sur des retards de traitement liés à des
restes à charge. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas plus
d'argent pour la protection sociale, mais simplement qu'avec un
peu plus et le 100% sécu, on peut faire beaucoup plus ! J'y
reviens à la fin de cette article.
Récemment Martin Hirsch, ancien ministre de
Fillon (!) et Didier Tabuteau, économiste de la santé,
ont publié une tribune dans Le Monde "Créons une assurance maladie
universelle". Ils veulent : "étendre l’assurance- maladie à
l’ensemble des dépenses de santé, en incluant dans la Sécurité
sociale la couverture complémentaire, aujourd’hui essentiellement
assurée par les mutuelles et les assurances. Il s’agit ni plus ni
moins d’étendre à l’ensemble de la France, en le complétant, ce
qui existe déjà en Alsace-Moselle." Je frémis un peu quand
j'entends ces gens connus pour leurs engagements libéraux défendre
ce qui peut apparaître comme proche du 100% sécu car un bel
affichage est toujours possible, associé à une réalité beaucoup
moins belle comme pourrait l'être, non pas le remboursement de
tous les soins prescrits, mais celui d'un panier de soins. Je prends
un exemple. La sécu pourrait rembourser à 100% un appareil
auditif ... du siècle dernier. Et le remboursement des
appareils modernes plus couteux ... et plus performants (la technologie évolue très vite) serait
réservé à ceux qui auraient pris une "surcomplémentaire" et comme
il n'y aurait plus de mutuelle, ce serait obligatoirement auprès
d'un organisme privé alimentant les actionnaires, le monde de la
finance n'étant ainsi pas lésé (il y a évidemment bien d'autres
choses à mettre sur le compte des surcomplémentaires, le forfait
hospitalier, les soins dits de confort ... si indispensables à
certains souffrant de maladies chroniques). Et puis il y a le
"comment on finance ?". Ceci dit, cela fait plaisir de voir que la
proposition du PCF du 100% sécu inspire si largement !
Il y a Jean Luc Mélenchon aussi qui reprend
la proposition du 100% sécu ! Là, beaucoup moins de craintes
que ce ne soit pour alimenter indirectement le monde de la
finance, car on sait que ce n'est pas que le financement d'un
panier de soins, mais bien de tous les soins prescrits.
Et en plus il donne des éléments de financement : il faudrait
trouver 16 milliards d'euros par an (les dépenses non remboursées,
selon les chiffres officiels, payées directement par les malades).
Il en trouve 8 en supprimant les dépassements d'honoraires, 6,5
dans les frais de gestion des mutuelles et 3,5 dans les
exonérations fiscales des mutuelles. Lui aussi veut s'aligner sur
le système d'Alsace-Moselle.
C'est un peu simpliste, mais c'est malgré tout la seule expression
d'un candidat à la présidentielle qui tienne la route sur le sujet
!
Simpliste, parce qu'il faut trouver plus de 16 Mds : il y a tout
ce que les gens ne se paient pas ... parce qu'ils n'en ont pas les
moyens, les budgets des hôpitaux à augmenter très sensiblement ...
; simpliste, car si on supprime les dépassements d'honoraires il y
a des actes à réévaluer, car les dépassements d'honoraires, c'est
à la fois des excès de certains médecins, mais aussi quasiment une
obligation pour d'autres, les gouvernements successifs ayant
poussé la sécu à ne pas augmenter certains tarifs en s'abritant
hypocritement derrière cette possibilité de dépassements
d'honoraires ; simpliste car on n'économisera pas tous les frais de
gestion des mutuelles - la sécu a besoin de renfort - et que les
exonérations fiscales de quelque chose qui n'existe plus j'ai du
mal à comprendre comment ça donne des sous !
Ceci dit, il est possible de financer le
100% sécu !
Déjà une précision : dans le système tel qu'il a été conçu en
France par Ambroise Croizat, la protection sociale a un rôle fort
dans le partage des richesses entre le travail et le capital et
tout déplacement de la cotisation vers la fiscalité (ou la CSG,
qui fait partie de l'impôt) contribue à enrichir le capital au
détriment de la rémunération du travail. Et depuis 20 ans, le
pourcentage de ce qui revient au capital a augmenté au détriment
des salaires. Et cela est valable aussi en Alsace Moselle, où la
seule différence est une cotisation salariale plus importante (en
lieu est place d'une cotisation à la sécu et d'une cotisation à la
mutuelle), avec, de fait, des économies de gestion. De plus, le
capital investit de moins en moins, préférant jeter l'argent par
les fenêtres en le donnant aux actionnaires ! Si l'on n'inverse pas
ces mécanismes, notre pays va continuer à s'appauvrir, rendant
illusoire tout progrès social.
Les communistes proposent donc de faire cotiser les revenus
financiers des entreprises (le coût du capital), à la même hauteur
que les salaires. Selon les comptes de la Nation 2015, il y a
313,7 milliards d'euros de revenus financiers des entreprises et
des banques. Leur mise à contribution rapporterait 41 milliards à
l'assurance maladie (26 pour la retraite et 16 pour la branche
famille). On est très largement au dessus des 16 milliards
nécessaires pour compenser les dépenses payées par les malades et
il y a donc une bonne part pour l'amélioration des soins. Cela
serait en plus vertueux, réorientant le capital vers
l'investissement plutôt que le placement financier !
Parallèlement, le PCF propose d'en finir avec les exonérations et
de moduler les cotisations patronales pour faire payer plus ceux
qui ont des conduites anti emploi et anti environnement.