Voilà le courrier adressé par Jean SOUTTRE à Radio Fugi :
Bonjour à toute l’équipe de FUGI FM
Comme vous le savez, étant natif de Vireux-Wallerand, je suis un auditeur assidu et fidèle de votre station, qui est pour moi un moyen très agréable d’avoir des nouvelles de la pointe depuis Colmar.
L’objet de mon mail : la liaison ferroviaire Charleville-Mézières/Givet
Je connais très bien cette ligne pour l’utiliser ou tenter de l’utiliser à chacun de mes retours dans les Ardennes, et pour avoir été contrôleur sur cette ligne jusqu’à ma mutation en Alsace. J’ai d’ailleurs également accompagné les trains jusqu’à Dinant.
Ce qui me fait réagir aujourd’hui, ce sont les interviews de Messieurs WALLENDORF, Maire de Givet, et DECKENS, Maire de Vireux-Wallerand et Président de la Com Com Ardennes Rives de Meuse.
Ma 1ère réaction sera celle-ci : Il est bien de faire s’exprimer les élus locaux, mais je crois savoir qu’ils n’étaient pas les seuls à participer au CLAD qui s’est tenu à Revin le 29 janvier. Je pense que les usagers avaient également leur place sur votre antenne tout comme les autres forces politiques en présence et qui ont beaucoup œuvré pour fédérer un maximum d’usagers et les inciter à participer massivement à cette instance (rencontre dans les gares, signatures de pétitions, etc.)
Ces uniques interventions sont, à mon sens, dommageables pour le pluralisme de l’information car, en plus, j’ai appris que ces deux personnalités de la pointe ne se sont pas ou si peu exprimées durant cette réunion.
Ces deux élus locaux essaient de faire croire qu’ils agissent pour sauver cette ligne ferroviaire alors que ce sont eux, de part leur appartenance politique, qui n’ont cessé de cautionner l’endettement et le démantèlement du système ferroviaire français qui conduit à la situation actuelle. Celui-ci date depuis 1974 avec la volonté de VGE de vouloir construire le TGV mais sur les fonds propres de la SNCF au détriment du réseau national, ce qui marque le début du désengagement de l’état actionnaire principal et unique de l’entreprise de service public.
Sans vouloir prendre la défense de la SNCF et de RFF, il faut savoir que l’idée de la séparation des infrastructures et de l’exploitation date de 1996 sous CHIRAC Président, JUPPE 1er Ministre avec Bernard PONS Ministre de l’aménagement du territoire et Anne-Marie IDRAC Secrétaire d’Etat chargée des transports. (Tous membres du RPR de l’époque, UMP d’aujourd’hui. En créant RFF ils l’ont généreusement doté de la dette de la SNCF. Donc RFF lourdement endetté est obligé de trouver de l’argent pour entretenir et construire de nouvelles lignes. Cet argent provient en partie des péages exorbitants demandés par RFF à la SNCF pour faire circuler les trains, résultats : RFF est toujours endetté et la SNCF continue de s’endetter également, c’est le chat qui se mord la queue !!! De plus l’abandon « généreux »des infrastructures autoroutières au privé sous SARKOZY, tout comme l’abandon de l’écotaxe par le gouvernement actuel, n’arrange rien à cet épineux problème du transport ferroviaire, bien au contraire puisque la SNCF à cassé totalement son outil de production FRET au profit de la concurrence et du privé. De ce fait, moins de péages à RFF, mais aussi de massives suppressions d’effectifs et d’emplois. Voilà très succinctement décrite la situation du système ferroviaire français que cautionnent implicitement ces deux élus !!
Mr WALLENDORF émet l’idée de faire payer en partie la réfection de la ligne par EDF pour le transport des déchets nucléaires, c’est du n’importe quoi ! Par contre, s’est-on posé la question de faire payer aux contribuables les 18 milliards d’euros qu’ont coûté le sauvetage du crédit lyonnais avant de, là-aussi, privatiser cette banque, c’est-on posé la question lorsque l’état français, les contribuables, a accepté de payer les intérêts des emprunts bancaires contractés par Disney pour construire le parc Eurodisney à Marne-la-Vallée ??
De plus cet élu met en opposition l’électrification la ligne 4 (liaison ferrée Paris-Bâle) entre Paris et Troyes et la réfection de Charleville-Givet, afficher de tels propos fait montre d’une méconnaissance totale des fondamentaux des Services Publics. Je reviendrai sur ce sujet à la fin de mon propos.
Mr DECKENS affirme haut et fort qu’il faut une décision politique forte, il a parfaitement raison, mais elle doit être difficile à prendre car aux antipodes de celles qui ont été prises pas ses pairs politiques !!!!
De plus lui aussi affiche une méconnaissance totale des fondamentaux des services publics lorsqu’il reprend et se satisfait de l’affirmation faite par RFF qui dit que : "cette liaison ferroviaire n’est pas une ligne régionale, mais une ligne nationale". Là aussi je reviendrai sur ce sujet plus bas.
Concernant la liaison Givet/Dinant, là aussi Mr DECKENS à tort lorsqu’il dit : "On verra cette liaison lorsque Charleville/Givet sera fait" !!! Et bien non, c’est en même temps qu’il faut agir pour le rétablissement de cette ligne dans le cadre d’une cohérence dans un schéma des transports européens. Oui cette liaison a toute sa pertinence tant en terme de transports collectifs que Fret. Ce n’est pas le tout d’affirmer dans les slogans que nous sommes "au cœur de l’Europe", il faut faire le nécessaire pour y être.
Petite précision : j’étais contrôleur sur le train inaugural flanqué des drapeaux Belge et Français entre Charleville et Dinant dans lequel Jacques Sourdille paradait et en se félicitant de l’ouverture vers la Belgique. Hélas les rares liaisons mises en place ne correspondaient pas aux besoins exprimés par les usagers, ce qui est la base essentielle de la pertinence des Services Publics.
Je reviens brièvement sur quelques fondamentaux du service public. Partant du principe que tous les citoyens doivent bénéficier des mêmes services fussent-ils des ruraux ou des citadins et quelque soit leur position dans la hiérarchie sociale, il est inconcevable de mettre en opposition des lignes ferroviaires entre elles, comme le fait Mr WALLENDORF, de la même manière qu’il est inconcevable de parler de ligne d’intérêt régional ou national, comme le fait Mr DECKENS !
Elles font toutes partie intégrante d’un maillage du territoire national au plus près des intérêts des citoyens et usagers de ce pays. Lorsque l’on s’exprime en termes de service public on le fait dans le cadre de la rentabilité sociale et non financière.
C’est bien là l’esprit du Service public tel qu’il a été mis en place en 1945 par le Conseil National de la Résistance sous le contrôle de Marcel PAUL et d’Ambroise CROIZAT, tous deux ministres communistes.
J’en arrête là mon propos en souhaitant que vous donniez la parole aux forces en présence usagers, politiques (tous) cheminots et entreprises ferroviaires, et pourquoi pas organiser un débat public autour de ce problème.
Le contrôle de l’utilisation de l’argent public n’appartient pas aux politiques, il appartient aux citoyens.
En souhaitant que vous preniez en compte ma requête, je présente toutes mes plus sincères salutations !
Jean SOUTTRE
PS : Continuez, votre station est vraiment sympa.