Profit, ce maître mot de l'idéologie capitaliste ! L'augmenter nécessite de faire mieux que les autres, mieux en innovant (dans quel but ?), mieux en exploitant plus sans s'attacher aux conséquences sociales, environnementale.
L'innovation est devenue à la mode ! Est elle condamnable ? Evidemment pas à condition d'en préciser les buts.
Car elle est indispensable à la survie de notre société : innovation pour mieux satisfaire les besoins de toutes et tous tout en respectant notre planète !
Plus on est, plus on a d'idées pour innover : une raison qui pousse les capitalistes à concentrer l'élite financière, intellectuelle (leurs intellectuels - j'y reviendrai) et tout près, mais pas mélangé, évidemment, leur prolétariat, leur main d'oeuvre à exploiter pour minimiser les coûts : la ville et les banlieues. Le reste du territoire français est sans importance pour eux !
Que l'on vive mal dans des banlieues, loin de son travail, de son lieu d'exploitation, c'est bien le cadet de ses soucis. Et que ceux qui ne veulent pas venir dans leurs grandes villes, leurs métropoles comme il dit, soient de plus en plus exclus de la société du XXIème siècle, c'est pas le problème des capitalistes.
De temps en temps, il faut lâcher un peu de lest ! Cela a été le cas avec les réformes de 1982-83 et la première vague de décentralisation : un peu plus de démocratie de proximité, un peu plus de considération pour la "province". Mais bien vite, les moyens de récupérer des avantages pour le capital ont été trouvés, comme mettre en concurrence les régions, développer le chantage à l'emploi, leur faire cracher des aides...
Mais la démocratie de proximité (et pourtant, comme on est encore loin d'une vraie démocratie de proximité !), la diffusion du savoir par des universités dans chaque région, qui cherchent à être implantées dans tous les territoires, car les populations ont pu influencer ces choix, ça pèse au capital ! Des services publics partout, quelle charge pour lui ! Les zones où les profits sont les plus importants, ça lui suffit et peu lui importe que la vie n'y soit confortable que pour les plus fortunés, c'est leur cas à eux, les capitalistes. Métro, boulot, dodo, c'est pas son problème !
Il lui faut se réserver quelques centres, les métropoles selon le terme utilisé, y concentrer ses serviteurs et la désertification du reste du territoire, cela va permettre des économies, justifier des fermetures de services publics...
Réunir des régions, quelle bonne idée pour le capital : cela va limiter le nombre de centres, faciliter la désertification de territoires plus éloignés des lieux de décision.
Et c'est pour cela que l'on ne peut reprocher à Jean Paul Bachy, le président de la région Champagne Ardenne, de se battre pour une grande région associant la Picardie, la Champagne Ardenne et la Lorraine : la Champagne Ardenne serait au centre, un atout essentiel pour les territoires de la région. Sauf que l'on ne voit pas comment les Lorrains ou les Picards peuvent accepter d'être "marginalisés" !
Et surtout cela témoigne d'une résignation à cette imbécile réduction du nombre des régions ! Ayons un peu d'ambition !
Mais discutons jusqu'au bout l'argumentation selon laquelle des grandes régions seraient plus à même de faciliter le développement économique de notre pays ! Plus on est nombreux, plus on a des idées ... et l'on sait bien l'attirance que Paris, Lille, Nancy peuvent avoir sur les jeunes Ardennais, plus que Reims. Il pourrait quand même y avoir des avantages ?
La concentration culturelle, artistique, intellectuelle ouvre des portes, facilite les rencontres, aide à la mise en oeuvre d'idées nouvelles, facilite l'innovation dont nous avons tant besoin ... sauf que c'est parfois, ou souvent (?) en s'adaptant au moule d'un choix de vie, d'un choix de société.
Et si cette concentration, c'était aussi la perte de toute la richesse de la diversité de ceux qui ne veulent pas s'adapter à ce moule ? Et si c'était aussi le tri dans les innovations possibles entre celles qui sont "bonnes" dans le cadre de l'idéologie actuelle, celles qui vont permettre d'augmenter le profit et celles qui sont bonnes pour l'Humain ?
Ne faut il pas travailler à un autre aménagement du territoire ? Un aménagement du territoire qui permette les avantages liés à la rencontre, à l'effervescence intellectuelle qu'il peut y avoir dans un grand centre mais aussi les atouts de la diversité des aspirations de notre peuple, la richesse de ses cultures ? Lutter contre l'isolement de certains, ce ne sera pas en favorisant la désertification que l'on va y arriver !
C'est d'autant plus possible que les voyages n'ont jamais été aussi rapides, qu'internet, les réseaux sociaux permettent des échanges instantanés d'informations, d'idées ...
Faisons donc en sorte, non pas de privilégier ceux qui ont les moyens d'être "au centre" mais de permettre à toutes et tous d'être dans l'effervescence des idées nouvelles ! Evidemment, c'est dangereux pour le capital : cela risque d'élargir sa pseudo élite intellectuelle à des qui ne pensent pas "comme il faut". Mais voilà un vrai projet pour la jeunesse : ne pas avoir à choisir entre ses racines, sa famille, ses copains et participer aux innovations nécessaires, technologiques, industrielles, agronomiques, sociales ... pour que l'économie satisfasse mieux les besoins des uns et des autres tout en respectant l'avenir de notre planète. Il y a du boulot et on a besoin de tous pour cela !
La réforme territoriale ne doit donc pas être construite autour de quelques métropoles regroupant l'élite de la pensée ultralibérale entourées de ses banlieues mettant à disposition les travailleurs exploités et abandonnant des pans entiers du territoire français, réserve de main d'oeuvre bon marché à l'occasion, moyen de faire pression sur les salaires.
Elle doit permettre la mise en réseau de toute la richesse humaine de notre pays : il faut donc des régions permettant ces réseaux, non pas en s'agrandissant, favorisant l'anonymat, non pas en s'organisant en concurrence avec les régions voisines, non pas en se refermant sur leurs limites, mais en développant les coopérations, les échanges.
La réforme territoriale ne doit pas être au service du patronat mais promouvoir l'Humain !